Marais de Saint-Georges de Rex – Amuré (Deux-Sèvres) La lettre – oct. 2016

Édito

Le Marais de Saint-Georges-de-Rex – Amuré est un site phare du marais mouillé deux-sévrien, pour ses richesses écologiques et paysagères, mais surtout pour le travail de partenariat exemplaire qui a été mis en place pour les préserver.

Ainsi depuis 20 ans, le Conservatoire Régional d’Espaces Naturels de Poitou-Charentes, le Parc Naturel Régional du Marais poitevin, les communes et les éleveurs œuvrent ensemble à la mise en valeur de ce site remarquable.

L’action de maîtrise foncière et de restauration des prairies engagée par le Conservatoire et le Parc a permis de conforter l’activité d’élevage sur ce secteur. Cette activité étant la clé de voute d’une gestion « productrice » de biodiversité, de zones propices à l’élevage et du paysage typique du marais mouillé, il est aujourd’hui indispensable que l’implication des éleveurs locaux et les partenariats engagés réciproquement, puissent perdurer. C’est pourquoi, le Conservatoire continuera à œuvrer sur le Marais de Saint-Georges-de-Rex – Amuré au moins pour les 20 prochaines années et fera valoir cette expérience positive faisant la démonstration d’une complémentarité remarquable entre économie agricole et écologie, sur d’autres territoires de marais mouillés.

Benoit Biteau, Président du Conservatoire Régional d’Espaces Naturels de Poitou-Charentes.

 

Le Marais poitevin présente des paysages façonnés au fil des temps par l’Homme. Il est ainsi constitué de deux grandes entités aux caractères paysagers très différents : le marais desséché, protégé de la mer et des crues par des digues à des fins d’exploitation agricole, et le marais mouillé qui joue un rôle de réceptacle des eaux du bassin versant avant écoulement vers la mer.

Un site majeur pour le Marais poitevin

Le Marais de Saint-Georges-de-Rex – Amuré est une « poche » de marais mouillé situé dans la partie orientale du Marais poitevin, en bordure de la plaine. D’environ 250 hectares, il présente une identité paysagère typique. Cette cuvette humide aux sols tourbeux est composée d’une multitude de petites parcelles, délimitées par un important réseau de fossés et de conches. Traditionnellement, ces parcelles étaient exploitées en terrées* ou en prairies. Des alignements de frênes têtards viennent compléter le paysage et confèrent à ce marais un fort caractère bocager.

L’Histoire nous apprend qu’une grande partie du site était constituée d’un ancien communal qui fut vendu en 1870 aux villageois, après « découpage » en petites parcelles, afin de financer la construction de l’église de Saint-Georges-de-Rex.

*Petites parcelles de frênes taillés en « têtards », entourées de fossés.

Un patrimoine naturel riche, mais menacé

L’évolution des facteurs naturels et des pratiques humaines sur le Marais poitevin a engendré la formation de milieux à fort intérêt pour la biodiversité. En effet, le Marais de Saint-Georges–de-Rex et d’Amuré abrite des prairies humides, des mégaphorbiaies à Reine des près, des cariçaies, ainsi que des boisements humides de frênes à hautes herbes et des milieux aquatiques.

Ces habitats, très différents les uns des autres, peuvent être rares sur le marais. De par leur richesse et leur diversité, ils favorisent la présence d’espèces faunistiques et floristiques remarquables. On peut ainsi rencontrer le Cuivré des marais, l’Euphorbe des marais ou bien encore la Renoncule à feuilles d’Ophioglosse sur les prairies humides. On peut également noter dans les boisements humides, la Rosalie des Alpes, la Genette et la Fougère des marais. La Loutre d’Europe, présente sur l’ensemble du site, peut trouver refuge dans la partie restée totalement inaccessible par voie de terre.

Ce site d’intérêt majeur sur le plan paysager et écologique connaît un équilibre fragile menacé par l’évolution de l’occupation du sol.
La régression de l’élevage bovin constaté depuis les années 1980 conduit à une disparition des prairies au profit de boisements naturels ou de plantations de peupleraies. Les parcelles de pourtour, moins humides, ont aussi été mises en culture. La préservation du marais passe donc par la nécessité de maintenir les prairies, et donc d’assurer leur gestion en s’appuyant sur le savoir-faire des éleveurs locaux.

Un programme de préservation et de réhabilitation engagé par le Conservatoire depuis 1996 en partenariat avec les communes et le Parc Naturel Régional du Marais poitevin

Afin d’assurer la restauration et l’entretien du marais sur le long terme, la maîtrise foncière est recherchée dans le but de constituer des îlots de pâturage et d’assurer le maintien de formations végétales à fort intérêt écologique. Actuellement, l’animation foncière réalisée avec la Safer* a permis d’acquérir à l’amiable 46 hectares, soit près de 150 parcelles.

Après une phase de restauration des prairies (broyage, pose de clôtures, …) portée par le Parc dans le cadre du Plan d’Aménagement et de restauration des marais mouillés, 26 hectares sont à présent gérés par le biais de baux ruraux à clauses environnementales passés entre le Conservatoire et cinq éleveurs locaux. Ils entretiennent ainsi ces prairies par pâturage extensif bovin. Sur les 20 hectares restants, 14 ha sont des boisements humides gérés en évolution spontanée pour préserver des zones de quiétude pour la faune et 6 hectares bénéficient de contrats de gestion Natura 2000 permettant de restaurer et préserver une mosaïque d’habitats diversifiés et écologiquement riches (mégaphorbiaies, roselières, …).

Un comité de gestion a été constitué afin que le projet soit mené en lien avec les acteurs et élus locaux, les éleveurs, la Chambre d’agriculture des Deux-Sèvres, les administrations d’État et les associations de protection de la nature.

*Société d’aménagement foncier et d’établissement rural

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Point de vue

« La restauration des prairies par le Conservatoire et le Parc permet l’agrandissement des îlots d’exploitation, ce qui m’a permis de relancer l’élevage. Cette activité était en déclin sur mon exploitation et dans le marais en général. Les causes principales selon moi, étant le morcellement, la difficulté de trouver des parcelles à louer, l’implantation des peupleraies… Ainsi, j’exploite aujourd’hui une trentaine d’hectares de prairies de marais avec un cheptel de 50 bovins dont 20 vaches allaitantes. Pour valoriser ces espaces à faible valeur nutritionnelle, j’ai choisi la race Maraîchine très bien adaptée au système extensif exigé par le cahier des charges du Conservatoire. »

Jacques Gelot, Polyculteur-Éleveur à Saint-Georges-de-Rex.

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Et demain

Après 20 ans d’actions, le programme n’est pas terminé. Des acquisitions ponctuelles peuvent encore être réalisées pour conforter les îlots de pâturage ou la mosaïque d’habitats à haute valeur patrimoniale. C’est aujourd’hui l’heure de réviser le plan de gestion du site, qui, suite à l’évaluation des actions mises en œuvre, planifiera la gestion à mettre en place sur les dix prochaines années. Le diagnostic écologique, réalisé en 2015 par Deux-Sèvres Nature Environnement et le Groupe Ornithologique des Deux-Sèvres, montre que la gestion pratiquée a permis le maintien d’habitats et d’espèces remarquables. Les surfaces de prairies humides auparavant en déprise ont augmenté et leur état de conservation s’est amélioré grâce à leur entretien par pâturage. Le Conservatoire poursuivra, en lien avec ses partenaires dont les éleveurs locaux, le travail engagé pour conserver les richesses écologiques de ce marais mouillé.

En parallèle, la sensibilisation à l’environnement et aux enjeux de préservation de ce marais reste un objectif important. C’est pourquoi, des sorties découverte continueront à être proposées régulièrement. Les visiteurs peuvent également parcourir ce marais, à pied ou à vélo, via des sentiers balisés.