Le Val de Clouère (Vienne) La lettre – oct. 2016

Bord de Clouere, Vienne © C. Auburtin
Bord de Clouere, Vienne © C. Auburtin

Le Val de Clouère (Vienne) La lettre – oct. 2016

Édito

Conserver les espaces naturels, c’est la vocation du CREN. Cette mission est parfaitement assurée sur la Clouère, un affluent du Clain, à 30 km au sud de Poitiers.

Le CREN procède régulièrement à l’acquisition foncière de petites zones humides abandonnées, en lien avec la Clouère. Sur ces espaces, qui sont de véritables réservoirs de biodiversité, le CREN met en place, après des études approfondies, des plans de gestion.

Ces espaces sont fragiles et seraient condamnés à disparaître sans une intervention humaine.

Avant tout, il a été nécessaire de bien comprendre toutes les interactions qui lient le milieu naturel aux activités humaines.qui s’y sont rattachés depuis des siècles. Le fonctionnement de ces écosystèmes est complexe ; il prend en compte la géologie, l’hydrogéologie, la météorologie, l’évolution historique des pratiques agricoles et des interventions humaines dans ces espaces, l’adaptation et le développement le la flore et de la faune sur ces territoires.

Aujourd’hui, ces espaces protégés, ces réservoirs de biodiversité sont un lieu de promenade pour les habitants de la Vallée de la Clouère. Ils ont aussi un rôle pédagogique pour la population et en particulier pour nos enfants qui s’y rendent sur place régulièrement, dans le cadre des activités scolaires et périscolaire. Ils y découvrent des espaces aménagés propices à observer la richesse que nous offre la nature dans ces zones humides.

François Bock, Maire de Gençay

Un chapelet de zones humides riches en biodiversité

Reprendre aquarelle martin_pecheur_vb de Valérie Babin

martin pecheur © V-Babin

La Clouère présente, de sa source à sa confluence avec le Clain, un réseau de zones humides. Ce « réseau écologique » est composé d’habitats naturels riches en biodiversité, appelés réservoirs biologiques. Ils sont interconnectés grâce à la Clouère et sa ripisylve1, permettant ainsi une bonne circulation des espèces.

Depuis 2004, le Conservatoire mène une démarche d’animation foncière2 sur l’ensemble du Val de Clouère, afin de pouvoir protéger ces zones humides d’intérêt patrimonial. Aujourd’hui, environ 21ha (7,5ha en acquisition, 8ha en baux emphytéotiques et 5,5ha en convention de gestion) sont gérés par le Conservatoire et répartis en 6 sites, d’amont en aval, de la commune d’Usson-du-Poitou à celle d’Aslonnes.

(1) = végétation des bords de cours d’eau

(2) = Démarche consistant à contacter les propriétaires de parcelles en zone humide, afin de leur proposer une acquisition à l’amiable, une location par bail emphytéotique ou une convention de gestion.

Qu’est-ce qu’une zone humide ?

Véritable réserve de vie, elle est un « espace de transition entre la terre et l’eau ».

Définition selon le Code de l’Environnement, Article L211-1 de la loi sur l’eau du 3 janvier 1992 :

« On entend par zone humide les terrains exploités ou non, habituellement inondés ou engorgés   d’eau douce, salée ou saumâtre, de façon permanente ou temporaire ; la  végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles   pendant au moins une partie de l’année. »

rainette_arboricole_hyla_arborea_c-auburtin

rainette arboricole hyla arborea ©c-auburtin

Les zones humides, victimes des a priori

Sur le Val de Clouère, comme partout en France, les zones humides ont longtemps été considérées comme des milieux insalubres et présentant même un danger pour les populations. Des actions de comblement ou de drainage se sont alors développées. Ajoutées à une intensification conséquente de l’agriculture et l’abandon progressif de certaines pratiques culturales (pâturage ou activité maraîchère notamment), elles ont provoqué une forte régression des zones humides de la vallée.

Intervenir pour la préservation, la restauration et la conservation à long terme de ces milieux est nécessaire. En effet, considérées comme remarquables à l’échelle du département, les zones humides de la vallée de la Clouère présentent des enjeux hydrauliques et écologiques conséquents.

Des zones humides considérées comme les « éponges » de la Clouère

La Clouère est une rivière qui peut en hiver mais qui souffre d’un manque d’eau en été. Heureusement, les zones humides sont là pour elle… et pour nous ! En effet, elles jouent le rôle d’éponges en régulant les niveaux d’eau de la rivière. Elles stockent localement les eaux de débordement lors des crues, pour protéger des inondations et créer une réserve d’eau qu’elle restitue progressivement, lorsque les niveaux de la Clouère viennent à baisser.

Ajouté à cela, les zones humides améliorent la qualité de l’eau, en réalisant une auto-épuration par les plantes et bactéries associées, pour le plus grand plaisir des hôtes de la rivière, et… des pêcheurs !

À la découverte de l’arche de Noé locale

L’importante mosaïque de milieux occupant la vallée permet à de nombreux animaux et végétaux d’y trouver un lieu de vie idéal. En vous promenant le long de la Clouère, c’est un ballet de formes et de couleurs, accompagné d’un concert mélodieux, qui vous attend. Des dizaines d’espèces de papillons et de libellules, comme le Cuivré des marais et l’Agrion de Mercure (espèces protégées), volètent devant vous, parmi les végétaux.

Vous pourrez notamment observer la rare et surprenante Grande douve (plante protégée), dont les fleurs émergent des fossés longeant les chemins, de juin à juillet.

La devinette sifflée par la Bouscarle de Cetti « C’est qui ? C’est qui ? C’est la Bouscarle de Cetti ! » ou le chant caractéristique de la Rousserolle effarvatte se fait entendre depuis un buisson, au sein d’une des belles roselières à Phragmites de la vallée. En parcourant le marais des Cosses, les plus chanceux pourront apercevoir des traces laissées par la discrète Loutre d’Europe : reste de repas, empreinte ou épreintes (marquage de son territoire par des excréments),…

P1010401_ Photo originale_ Justin Bonifait

Boisement alluvial ©Justin Bonifait

Une diversité à encourager sur le Val de Clouère

Si aucune gestion des milieux naturels n’est mise en place, l’ensemble des zones humides de la vallée évoluent naturellement et progressivement en boisement alluvial3. Or, c’est la diversité de milieux humides qui permet l’accueil de cette grande biodiversité importante à préserver. Conserver une mosaïque de zones en boisement humide et de zones en milieux humides ouverts est alors indispensable. Le Conservatoire agit donc en suivant 3 objectifs de gestion complémentaires :

  • Assurer l’alimentation en eau des zones humides, par un maintien des niveaux d’eau
  • Conserver la diversité de milieux humides
  • Améliorer le potentiel d’accueil de la biodiversité

La roselière de Puy-Félix, un cas concret de gestion

En 2013, le Conservatoire se lance dans la restauration écologique d’une zone humide ouverte risquant de disparaitre. En effet, plusieurs petites peupleraies occupaient une bonne surface, quant au reste, un enfrichement et un développement de frênes colonisaient l’espace(a). Des travaux ont été engagés afin de restaurer la parcelle en zone humide ouverte à végétation de type roselière ou mégaphorbiaie4, plus riche en biodiversité et en espèces patrimoniales.L’exploitation de la majeure partie des peupliers, ainsi qu’une action de broyage des buissons et des jeunes ligneux, se sont alors déroulées sur la zone en 2013. L’ensemble de ces actions a remis le sol à nu (b), permettant à la végétation de type Carex ou roseau de s’épanouir. Une année a suffi à ces plantes de milieu humide pour coloniser l’espace et offrir des paysages surprenants (c). Depuis 2016, la zone humide de Puy-Félix est devenue une grande et belle roselière : les roseaux Phragmites s’y développent, sur une hauteur de plus de 3 mètres, pour le plus grand plaisir des oiseaux qui peuvent nicher, se nourrir et se reposer à l’abri des regards et des prédateurs…

(3) = Boisement en zone humide inondable

(4) = Habitat naturel de zone humide, présentant une végétation herbacée dense et haute, souvent dominée par les Carex.

Balade sur le site des jardins de la Clouère

Les jardins de la Clouère, situés sur la commune d’Usson-du-Poitou, est le site géré le plus en amont du Val. D’environ 5 hectares, cette zone proche de l’urbanisation est caractérisée par trois ambiances paysagères distinctes. À l’entrée Nord, une zone en espace vert dévoile un parc où la biodiversité et l’urbanisation cohabitent. En poursuivant votre chemin, vous emprunterez un platelage5 sur plus de 500 mètres, au sein d’une friche buissonnante. Il se termine par un observatoire qui surplombe une roselière de plus d’un hectare. Ce parcours « sauvage » vous permettra, l’espace d’un instant, de vous retrouver dans une ambiance des plus naturelles. Enfin, la boucle s’achève par un chemin longeant la Clouère, souvent utilisé par les pêcheurs, où le bruit de l’eau suit vos pas… Bonne balade !

Et demain…

En 2019, un sentier d’interprétation sera composé de 8 panneaux d’information implantés tout le long du parcours. Il vous apportera, en toute partie du site, renseignements et anecdotes sur l’environnement qui vous entoure.

(5) = chemin en bois sur pilotis